16.

Le duc de Mayenne s’était donc rendu chez le marquis d’O avant de partir pour Joinville. Il était tôt et Dimitri avait dû réveiller son maître qui avait passé la soirée à jouer chez M. de Villequier. Mayenne avait tracé à François d’O les grandes lignes de l’offensive que le duc de Guise allait lancer au printemps. La plupart des villes basculeraient du côté de la Ligue, lui avait-il assuré. Quant à lui, il devrait remettre le château de Caen au duc d’Elbeuf.

O avait acquiescé, mais avait aussitôt prévenu M. de Villequier qu’il avait besoin de voir le roi. La rencontre avait eu lieu quelques jours plus tard, chez le gouverneur de Paris ; Henri III, qui recevait les députés de Flandre venus lui demander sa protection contre l’Espagne, n’avait pu se libérer plus tôt.

En racontant la discrète visite de Mayenne, François d’O avait déridé Henri III. Le roi avait déclaré avec un brin de mépris que les Guise agissaient comme des renards dans les poulaillers et qu’il n’avait pas peur d’eux. Il avait ses troupes de Suisses, ses gentilshommes et ses sujets fidèles.

— Je connais bien mon cousin Guise, avait-il conclu. Jamais il n’osera utiliser la force contre moi. Il ne brigue que la place de M. d’Épernon, même si sa sœur, Mme de Montpensier, agite trop les curés à mon gré. Quant à cette union de bourgeois qui devient insolente, j’y mettrai bon ordre. Pour l’instant, je suis plus soucieux de mes problèmes d’argent, où en es-tu ?

O avait alors complimenté le roi pour son intuition. Il y avait bien un rapinage des impôts et l’argent volé à la couronne était versé à Guise. Un contrôleur des tailles à son service vérifiait les registres et parviendrait à identifier les coupables, mais c’était un travail colossal qui allait prendre du temps.

Le roi avait paru contrarié que les choses ne puissent aller plus vite. Quant à O, il avait eu la pénible impression qu’Henri refusait de voir les périls qui s’annonçaient. Il avait donc demandé son congé pour rentrer à Caen, car il voulait préparer la défense du château si Elbeuf tentait de s’en emparer par la force. De mauvaise grâce, le roi avait accepté et ils s’étaient quittés tous deux malcontents.

Après le départ d’Henri III, Villequier avait donné à son gendre des explications sur l’attitude de leur monarque.

— Trop des proches de Sa Majesté se sont donnés à la Ligue et cherchent à l’égarer, mon ami. Ainsi M. de Villeroy lui a conseillé de traiter avec le Lorrain. Quant à Anne de Joyeuse, je sais qu’il penche un peu trop vers la Ligue. Il a vite oublié que le roi l’a fait duc et pair et lui a donné sa belle-sœur comme épouse[47].

— Ni Mayenne ni Mayneville ne m’en ont parlé, avait dit O, fort inquiet, car Joyeuse était gouverneur de Normandie.

— Le plus grave est la reine mère, avait ajouté Villequier. Elle aime Henri de Guise comme un fils et elle insiste pour son retour en grâce à la cour.

— Si je comprends bien, avait persiflé O avec dépit, parmi les proches de Sa Majesté, il n’y aurait que le duc d’Épernon qui resterait un adversaire des Lorrains ?

— Oui, lui avait sombrement confirmé son beau-père, qui ne voulait pas dire à son gendre que lui aussi commençait à pencher pour la Ligue.

O avait revu Richelieu le lendemain, juste avant son départ pour Caen. Le Grand prévôt était encore plus amer que M. de Villequier.

— Le roi ne veut pas croire ce qu’il ne veut pas voir, lui avait-il dit. Et ce n’est pas faute de le prévenir de tout ce remuement dans son royaume. Hier encore, pendant qu’il s’amusait à baller et masquer, M. le duc de Bouillon l’a avisé de la grande levée de gens de guerre faite par M. de Guise en sous-main. Sa Majesté lui a répondu avec insouciance qu’il ne le croyait ni ne le craignait !

Suivant un rite immuable, Olivier Hauteville se rendait tous les jours au tribunal de l’élection accompagné de Jacques Le Bègue et escorté de M. de Cubsac. Le Gascon sur son cheval, et eux en croupe sur le bardot. Cela faisait des semaines qu’il travaillait sur les registres des tailles de l’élection et Olivier avait l’impression de vider la mer avec une bassine.

Chaque jour, il découvrait avec effroi de nouveaux documents, trop souvent incohérents avec ceux qu’il avait déjà consultés. Plusieurs fois, Olivier s’était rendu chez le marquis d’O pour lui faire part de l’avancement de son travail. O lui posait des questions et lui donnait des conseils, souvent utiles, tant il connaissait bien les rouages financiers. Mais ces conciliabules avaient pris fin car, à la mi-février, François d’O était rentré à Caen. Désormais, Olivier était seul puisque Poulain était aussi parti pour Arras. Il poursuivait donc son travail à l’aveuglette, n’ayant personne pour le conseiller, à part son commis.

Le jeudi 28 février, Vivepreux et son valet se rendirent au Palais. Cassandre et Caudebec les accompagnèrent et s’installèrent au Petit Diable, un cabaret proche où se retrouvaient les avocats et les magistrats. Les femmes ne fréquentaient pas ce genre d’établissement, mais Vivepreux leur avait dit que la taverne disposait de chambres pour recevoir les dames. Caudebec en prit une et y conduisit la fille de M. de Mornay en demandant qu’un feu soit préparé et qu’on lui porte du bouillon. Il revint ensuite dans la salle commune, attendant qu’on vienne les chercher.

Au Palais, Vivepreux se rendit dans le cabinet où les officiers de la Cour des aides consultaient les actes et les registres de l’élection et vit qu’Olivier était là. Il le salua, ressortit et attendit dans la cour de mai. Comme il faisait froid, il allait par moments se réchauffer dans la grande galerie où il aperçut plusieurs fois le garde du corps d’Olivier, le nommé Cubsac. Il le connaissait de vue, car quand il avait rencontré Hauteville au Palais, une quinzaine de jours auparavant, le jeune homme le lui avait présenté.

Midi passé, ayant sans doute terminé son travail de la journée, Olivier sortit, suivi par Le Bègue. Le temps qu’ils retrouvent Cubsac, M. Vivepreux envoya son valet au Petit Diable, mais même en se dépêchant, quand Cassandre et Caudebec arrivèrent, Hauteville et ses gens étaient déjà partis.

Vivepreux leur fit une description du jeune homme et de la façon dont il était habillé. Il ajouta qu’il avait une fine barbe, qu’il montait un bardot, que son commis – qui marchait à pied – avait une cinquantaine d’années, et enfin qu’il était accompagné d’un garde du corps à cheval, barbu et ressemblant à un brigand. Tous trois formaient un groupe facilement identifiable.

Vivepreux leur ayant bien expliqué où se situait la maison des Hauteville, Cassandre et Caudebec ne cherchèrent pas à rattraper les trois hommes. Ils avaient jugé vraisemblable que le jeune Hauteville emprunte la rive droite de la Seine jusqu’à la rue des Arcis, pour rentrer à son logis et ils voulaient arriver avant lui.

Ils empruntèrent le pont au Change puis, malgré l’inconfort du siège de Cassandre, ils mirent leurs chevaux au trot dans la rue Saint-Denis. Caudebec en tête faisant dégager sans ménagement les marchands ambulants et les passants qui gênaient leur passage. En même temps, il restait vigilant, car il craignait de découvrir brusquement devant eux les trois hommes.

Passé les Innocents, Cassandre et Caudebec tournèrent à droite dans la rue Aubry-le-Boucher, puis remontèrent la rue Saint-Martin vers le logis des Hauteville. Arrivés à proximité, Caudebec aperçut en bas de la rue une silhouette à cheval qui pouvait bien être le garde du corps gascon. Ils remontèrent un peu la rue Saint-Martin pour mieux le voir venir et quand ils distinguèrent, au milieu de la voie encombrée par toutes sortes de montures, de charrettes et d’animaux, que le cavalier était accompagné d’un homme sur une mule, avec une troisième personne en manteau noir qui tenait la bride de l’animal, ils jugèrent que c’étaient certainement Hauteville et ses compagnons.

Ils redescendirent alors lentement la rue de manière à les croiser juste devant la maison que Vivepreux leur avait décrite, facilement reconnaissable avec sa tourelle et la courette couverte.

Comme le garde du corps mettait pied à terre, Cassandre, passant près de lui, glissa de son siège en amazone et tomba de son cheval en poussant un cri. Olivier sauta aussitôt de sa mule pour la secourir.

— Madame, êtes-vous blessée ? s’inquiéta-t-il.

— Je… je ne crois pas, fit-elle, en se relevant… Aïe… Je me suis tordu une cheville en tombant. Je ne sais pas ce qui est arrivé, j’ai glissé de la selle.

Sa robe était maculée de neige et de ce mélange de crotte et de boue puant qui couvrait les pavés des rues.

— Cela arrive souvent avec les sambues[48], fit Cubsac qui s’était approché pour examiner la selle. Regardez, c’est la fourche qui ne tient plus !

Caudebec avait pris la précaution de la desserrer de son socle.

— Puis-je vous proposer d’entrer un instant chez moi, pour vous reposer, madame, demanda Olivier, apparemment fasciné par le charme de la jeune fille. (Il faut dire qu’il n’en connaissait aucune dans son entourage.) Ma domestique pourra nettoyer votre manteau.

— Ma foi, je ne sais, monsieur… Monsieur Caudebec, croyez-vous que je puisse ? minauda-t-elle. Ma robe est salie.

— Je serai avec vous, madame, répondit Caudebec, qui avait aussi mis pied à terre.

— Dans ces conditions, j’accepte, Je me nomme Cassandre Baulieu, j’arrive d’Angers avec mon cousin. Nous venons voir ma tante malade, qui est religieuse au couvent des Filles-de-Sainte-Élisabeth.

— Mon nom est Olivier Hauteville, madame. C’est ma maison et je suis bourgeois de Paris. Ce monsieur est mon garde du corps, il se nomme M. de Cubsac, et voici mon commis M. Le Bègue.

— Mon père est procureur au présidial d’Angers, précisa-t-elle, comme pour lui faire comprendre qu’ils étaient de la même roture.

Olivier ouvrit la porte avec sa clef, leva la herse et la fit entrer. Pendant ce temps, Cubsac proposa à Caudebec de conduire leurs montures à l’écurie du Fer à Cheval.

Depuis qu’il était le chef de la maison, Olivier utilisait l’ancienne chambre de son père et avait conservé la chambre de la gouvernante comme cabinet de travail. Crédence, bahut et même le lit y étaient encombrés de piles de documents mais, comme c’était la seule pièce où un feu était allumé, c’est là qu’il fit entrer Cassandre. Jacques Le Bègue alla prévenir Perrine, leur servante, de venir avec des linges et une brosse pour nettoyer la robe et le manteau de leur visiteuse.

En l’attendant, ils s’assirent sur deux chaises à haut dossier, très inconfortables, et échangèrent platement quelques informations sur leur vie. Olivier expliqua qu’il vivait seul, son père étant mort récemment, et qu’il contrôlait les tailles avec son commis. Elle lui dit que son grand-père était drapier et juge-consul à Angers.

La servante vint et Olivier laissa les deux femmes pendant que Cassandre ôtait sa robe pour qu’on enlève les taches qui la souillaient. Quand elle se fut nettoyée et rhabillée, Olivier revint près d’elle et lui proposa de dîner. Il était déjà tard mais, travaillant toute la matinée au Palais, il ne pouvait prendre son repas plus tôt.

Elle accepta. Habituellement, le jeune Hauteville dînait dans la cuisine avec tout le personnel de la maison mais, pour l’occasion, il fit monter une table à tréteaux dans la pièce. Cubsac, Caudebec et Le Bègue se joignirent à eux. Durant le repas, la fille de M. de Mornay l’interrogea plusieurs fois sur ses études et sur ce qu’il faisait. S’il s’étendit sur sa thèse à la Sorbonne, il ne dit que peu de choses de son travail, sinon qu’il se rendait chaque jour au tribunal de l’élection recopier et consulter des registres. C’était une simple vérification des tailles, expliqua-t-il, et, malgré les demandes détournées de la jeune femme, il ne lui dit pas qui lui avait confié cette tâche. Le Bègue fut tout aussi muet sur ce sujet. En revanche, Olivier raconta la mort de son père et Cassandre parut affligée. Ce furent les seules paroles sincères de la jeune femme.

Elle expliqua qu’elle logerait pour quelques semaines à l’hôtellerie du Fer à Cheval située à une cinquantaine de toises de la maison des Hauteville, entre le cul-de-sac Clairvaux et l’impasse du More. C’était l’une des plus vastes et des plus confortables auberges du quartier, avec de nombreuses dépendances, des remises et des écuries. Olivier les connaissait puisque c’est là qu’il laissait sa mule et Cubsac son cheval. Le plus grand corps de logis avait trois étages et disposait même d’un grand jardin. Isabeau de Limeuil avait eu la précaution d’y envoyer un valet la veille, en fin d’après-midi, pour y prendre deux chambres.

Les jeunes gens se quittèrent assez tard après s’être promis de se revoir, ce qui serait facile, tant l’hôtellerie était proche. Une fois au Fer à Cheval, Cassandre écrivit une lettre que Caudebec fit porter par un gamin à la maison de Scipion Sardini.

Ils étaient tous deux satisfaits que la première partie du plan de la douce Limeuil se soit si bien déroulée. Olivier était tombé sous le charme de Cassandre qui n’avait rien fait pour le dissuader de lui faire la cour. Restait maintenant à consolider cette confiance par quelques visites amicales comme Mme Sardini l’avait suggéré. Leur dessein était de faire découvrir au jeune homme que Jehan Salvancy était le responsable du détournement des tailles qu’il contrôlait. Il faudrait ensuite le convaincre de ne pas dénoncer le receveur des tailles au tribunal de l’élection et de récupérer lui-même les quittances. Pour l’heure, Mlle de Mornay n’avait aucune idée de la façon dont elle s’y prendrait.

En revanche, pour Caudebec, cette entreprise semblait impossible. Le bouillant capitaine de Philippe de Mornay ne voyait pas comment un jolet comme Olivier pourrait s’introduire chez Salvancy, maîtriser les deux gardes du corps et le concierge, ouvrir le coffre de fer fermé à clef, prendre les quittances, repartir… et les leur donner !

— De surcroît, ajouta-t-il, Olivier me semble un impétueux jeune homme. S’il apprend que Salvancy a occis, ou fait tuer, son père, il fera sans doute justice lui-même, il forcera l’entrée de la maison de Salvancy et il sera tué par les bravi que l’on a vus !

— Il convient donc d’agir avec prudence. Pour ma part, j’aimerais savoir pourquoi Olivier poursuit le travail de son père, suggéra Cassandre. D’après M. Vivepreux, Olivier n’a pas demandé à reprendre sa charge de contrôleur des tailles. Il n’aurait pu le faire, d’ailleurs, puisqu’il n’a pas vingt-cinq ans. Or pour pouvoir consulter les registres de l’élection, il a bien dû obtenir une autorisation du conseil des finances. Qui la lui a donnée ? Il y a là un petit mystère à résoudre.

Le lendemain, vendredi 1er mars, Maurevert se présenta chez Jehan Salvancy avec une lettre du duc de Mayenne.

Arrivé à cheval la veille, avec Paul Amer, son fidèle écuyer et une autre monture en longe transportant ses bagages et des armes – un mousquet, deux pistolets et trois épées ainsi que quelques dagues et mains gauches –, il avait pris une chambre à l’auberge de la Tête Noire dans la rue de la Bûcherie, un quartier pauvre, habité par les marchands de bois et les mariniers où il était certain que personne ne le connaissait.

À la Tête Noire, les chambres étaient desservies par une galerie de bois à claire-voie et un escalier extérieur, ainsi on pouvait entrer et sortir sans passer par la salle principale et il n’y avait guère que les valets d’écurie qui pouvaient remarquer les passages. À l’attention du quartenier qui contrôlait les étrangers – l’hôtellerie ne pouvait loger que les gens de passage – Maurevert avait présenté à l’aubergiste un passeport signé par le chancelier – M. de Cheverny – que lui avait remis Mayenne. Il était ensuite parti repérer la maison d’Olivier Hauteville avant de se rendre chez Salvancy.

Durant des années, Maurevert n’avait pu sortir sans une troupe armée pour le protéger. Il appréciait donc cette nouvelle vie où personne ne le connaissait, même s’il aurait aimé avoir un ou deux domestiques ou valet d’armes à son service. Mais c’était aussi une situation embarrassante puisqu’il ne pouvait faire appel à ses anciennes connaissances, pas plus qu’aux amis du duc de Guise puisque celui-ci voulait garder secrète son existence.

Dans la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, il dut interroger quelques marchands avant qu’on lui indique la maison du receveur des tailles. Finalement, il frappa à sa porte et fit passer par le concierge la lettre du duc de Mayenne. Salvancy le reçut aussitôt dans sa chambre. Son expression affichait une grande inquiétude.

Maurevert ne se présenta pas mais la lettre de Mayenne était sans équivoque. Le duc demandait au receveur des tailles d’obéir sans discuter à son envoyé.

Le tueur des rois expliqua qu’il avait besoin de six morions, comme ceux portés par le guet bourgeois, ainsi qu’une ou deux cuirasses, une ou deux pertuisanes, et six épées. Il voulait aussi connaître le nom du capitaine commandant le guet et le mot de passe de la semaine.

— Comment voulez-vous que j’obtienne tout cela, monsieur ? protesta Salvancy. Il est impossible d’acheter des armes et les gens du guet, qui ont morion, cuirasse et épée, ne voudront pas me les céder ! Avec quelques amis, nous cherchons justement à nous en procurer pour nous mettre au service de Mgr de Mayenne, mais c’est quasiment impossible.

— Débrouillez-vous comme vous pouvez ! cracha Maurevert. Il me faut tout ça dans une semaine. Après quoi, vous serez débarrassé de votre Hauteville. Si vous ne me procurez pas ce dont j’ai besoin, le duc sera suffisamment fâché contre vous pour vous faire pendre.

— Vous voulez ces armes pour forcer la porte de M. Hauteville ? s’enquit le receveur, visiblement abasourdi.

— Oui. Vos amis souhaitent bien sa disparition ?

— En effet, que ne me l’avez-vous dit plus tôt ! J’ai bien mieux ! J’ai la clef de sa maison !

— Vous avez sa clef ? Où ?

— Ici, dit Salvancy en désignant son lit.

— Pourquoi Mgr de Mayenne l’ignorait-il ?

— Je ne sais pas… On ne m’a rien demandé… On m’a juste dit que bientôt Hauteville ne serait plus un problème car M. de Mayneville s’en occupait.

Maurevert soupira. Ces bourgeois étaient incorrigibles dans leur bêtise !

— Donnez-moi cette clef !

Salvancy alla à son lit et glissa la main sous le matelas, puis la fit courir sous toute la longueur.

Rien !

Il recommença.

— Alors ?

— C’est incompréhensible, elle était là ! Ceux qui m’ont débarrassé du père de Hauteville ont trouvé cette clef chez lui et me l’ont laissée avec des registres.

Maurevert s’approcha. Avec son seul bras, il ne pouvait être utile.

— Jetez le matelas par terre ! fit-il, exaspéré.

À grand-peine, Salvancy s’exécuta. Son matelas en laine était très lourd, mais il n’y avait rien au dessous.

— Où est-elle ? Où est cette clef ? ragea Maurevert en le bousculant.

— Je ne sais pas, je l’avais mise là… Elle a dû tomber… balbutia Salvancy.

Il se jeta à quatre pattes pour regarder sous le lit.

— Vous me faites perdre mon temps ! gronda Maurevert. Je repasserai vendredi prochain après vêpres. J’espère pour vous que vous aurez tout ce que je vous ai demandé.

Il sortit de la chambre sans le saluer et claqua la porte.

La semaine qui suivit fut celle de carême prenant. Le mardi[49], comme chaque année, le roi parcourut la ville avec une centaine de cavaliers en s’amusant à bousculer les passants et à les faire tomber dans la boue. Maurevert lui-même croisa une fois la bande rue de la Pute-y-Musse et resta prudemment sur le haut de la chaussée pendant que la troupe au galop bousculait hommes et femmes sur son chemin, le tout assorti de force rires et chansons paillardes. S’il reconnut plusieurs courtisans, aucun ne fit attention à lui.

Chaque jour de la semaine, le tueur des rois hanta les tavernes et les cabarets de la porte Montmartre ou du quartier de l’Arsenal, des endroits où il savait pouvoir recruter des truands prêts à tout pour quelques écus, et qui ne poseraient pas de questions. Mayenne avait abondamment garni sa bourse. Il eut pourtant quelques difficultés, car il voulait des hommes qui n’auraient pas l’air de brigands. Il leur demandait aussi de savoir à peu près manier une épée. Il en trouva finalement six, dont trois redoutables spadassins italiens en quête d’un maître à qui il demanda de se rendre à son auberge à la fin de la semaine.

De son côté, Jehan Salvancy rencontra son protecteur et ami pour lui raconter, avec une grande frayeur, la visite de l’homme de Mayenne et ses exigences. Son protecteur le rassura. Il demanderait à M. de Mayneville de fournir les armes demandées qui seraient prises sur celles que la Ligue avait achetées. Il obtiendrait aussi sans difficulté du prévôt des marchands le mot de passe du guet bourgeois. Quant au nom du capitaine commandant le guet, ils le connaissaient tous deux.

Dans la même semaine, Olivier Hauteville se rendit à trois reprises au Fer à Cheval. La première fois, ce fut pour proposer à Cassandre et à Caudebec de l’accompagner à la messe à Saint-Merry, ce que la jeune femme refusa en expliquant qu’elle irait à la chapelle du couvent des Filles-de-Sainte-Élisabeth où sa tante était religieuse. Il revint le mardi de carême prenant pour lui conseiller de ne pas sortir. L’année précédente, lui dit-il, le roi et ses favoris s’en étaient allés courir les rues, masqués et travestis, pour arracher les chapeaux aux hommes et les chaperons aux femmes afin de les jeter par terre. Ils s’étaient aussi amusés à frapper à coups de bâton tous ceux qui étaient masqués ! Cette fête des fous était une des passions d’Henri III qui le faisait encore plus haïr du peuple. Aucune femme ne serait en sécurité en dehors de chez elle, insista Olivier.

Lui-même ne travaillerait pas ce jour-là, car dans la cour de mai du Palais, comme chaque année pour carême prenant, la basoche présenterait les causes grasses. En souriant à ce terme, elle lui demanda de quoi il s’agissait. Il lui expliqua en cherchant des mots qui ne choqueraient pas ses chastes oreilles.

Les causes grasses étaient un des régals de la magistrature. C’étaient de petits procès bouffons où débattaient les avocats devant les parlementaires réunis. Ces plaidoyers étaient construits à partir de causes réelles présentées devant un parlement, mais toujours sur des faits drôles et surtout salaces. Comme M. de Cubsac et François Caudebec lui demandaient d’en raconter une, il choisit la moins grivoise parmi celles présentées l’année précédente…

C’est un procès qui avait eu lieu au parlement de Bordeaux. Un marchand de la ville était amoureux de la servante de sa femme, et afin de pouvoir profiter d’elle une nuit sans que sa femme s’en aperçût, il avait obligé un des garçons de sa boutique à tenir sa place dans son lit où il se couchait toute lumière éteinte, ceci après lui avoir bien fait jurer qu’il ne toucherait point à son épouse. Mais ce garçon, qui était jeune, ne se put contenir. Le lendemain, comme il était revenu dans le lit un peu avant le jour, sa femme lui porta un bouillon en le remerciant. Le marchand s’étonnant de cette gentillesse, elle lui dit en rougissant : vous l’avez bien gagné, monsieur mon mari ! S’étant expliquée, il découvrit le pot aux roses et accusa le garçon qu’il mit en procès, mais le parlement de Bordeaux lui donna tort et sa femme fut déclarée femme de bien[50].

L’histoire fit rire de bon cœur. C’est à l’occasion de cette visite qu’Olivier parla à nouveau de son père et de sa gouvernante, du malheur qui l’avait frappé, et aussi de ses espérances. Comme il s’adressait surtout à Cassandre, elle lui fit à son tour quelques confidences qui n’étaient cependant que des mensonges. Elle lui parla d’un père qui n’existait pas et d’une vie à Angers qui n’était pas la sienne.

Mis en confiance, Olivier lui expliqua que c’était Antoine Séguier, chargé du contrôle des tailles à la surintendance, qui lui avait demandé de reprendre le travail de son père, et qu’il espérait ainsi découvrir ceux qui l’avaient assassiné. Il ne lui parla cependant pas du marquis d’O, comme il s’y était engagé sur l’honneur, ni des doutes qu’il avait envers certaines personnes de la ligue parisienne que son père connaissait.

Deux jours plus tard, comme elle attendait une nouvelle visite du jeune homme, Cassandre prit conscience de son impatience à le revoir et de sa honte à ne lui confier que des mensonges. Jamais elle n’aurait pensé que le jeune homme la troublerait à ce point.

Le pire était à venir. Lors de la troisième visite, Olivier, croyant l’amuser, lui apporta un des nombreux pamphlets en vers que l’on distribuait sur les ponts. Ce feuillet-là, on le lui avait donné au Palais, le lendemain de carême prenant.

Tant que Guise vivra,

Par divine puissance,

En tout bien, dans la France,

La messe on chantera !

Il lui expliqua maladroitement que si Guise était populaire, c’est parce que les Parisiens pensaient que seul le Balafré pourrait empêcher l’hérétique Navarre de devenir roi et obtenir le départ d’Épernon et de Joyeuse, les deux favoris qui ruinaient le pays. Il n’y avait aucune passion dans ses explications. Depuis sa rencontre avec le marquis d’O, le jeune homme avait trop de doutes sur la sainte union pour croire tout ce qu’on affirmait sur la Ligue et sur le duc de Guise. Pourtant, les deux protestants se méprirent sur ses explications.

Si Cubsac rit de bon cœur devant les vers de mirliton, les visages de Caudebec et de Cassandre restèrent de marbre quand Olivier parla de la popularité de Guise et du refus des Parisiens d’accepter un hérétique comme roi. Ce soir-là, après leur départ, Cassandre avoua au capitaine de son père qu’elle n’était pas sûre d’avoir la force de continuer.

Il n’avait rien dit, devinant avec inquiétude que ce qui arrivait n’avait pas été prévu par la douce Limeuil.

Cette dernière entrevue avait eu lieu le jeudi. Le lendemain, Nicolas Poulain descendait la rue du Temple en escortant un chariot conduit par un valet qu’il avait engagé à Arras. Il se dirigeait vers l’hôtel de Guise. Le chariot contenait trois cents épées, corselets et casques qu’il avait achetés pour un peu plus de cinq mille écus, chariot, mulets et conducteur compris. Le voyage depuis Arras s’était fait en compagnie de M. de La Rochette qui avait rapporté deux charrettes contenant des mousquets et des arquebuses. L’écuyer du cardinal de Guise avait contourné Paris jusqu’à Saint-Maur pour faire embarquer son chargement sur une barque qui remonterait la Marne jusqu’à Châlons.

Pressé d’en finir, Nicolas Poulain laissa son chargement à un officier de Mayneville. Le conducteur se paierait en vendant la charrette et la mule. Pour sa part, il avait quitté Paris depuis quatre semaines et il avait hâte de revoir sa femme et ses enfants dont il était sans nouvelle.

En retrouvant son mari, Marguerite ne se tenait plus de joie. Certes, ce n’était pas la première fois qu’il partait plus d’une semaine, mais jusqu’à présent ses voyages et ses chevauchées ne l’avaient jamais si longtemps laissé loin d’elle. Elle avait toujours peur qu’il ne soit blessé, ou même qu’il perdît la vie dans quelque affrontement ou embuscade, et elle aurait bien aimé qu’il achète une charge de procureur ou de conseiller qui serait autrement moins dangereuse.

C’est ce qu’elle lui dit à nouveau après leurs retrouvailles, et il lui promit d’y songer en lui offrant une belle pièce de velours qu’il avait achetée chez le meilleur drapier d’Arras pour qu’elle s’en fasse une robe. Il embrassa aussi ses deux enfants et leur offrit les cadeaux qu’il leur avait rapportés : une médaille sainte en argent pour sa fille et une dague pour son fils.

Il dîna ensuite de bon appétit, puis se rendit au Palais où Merigot, le graveur qui tenait boutique au pied des degrés de la cour de mai, lui annonça que le prochain conseil des Seize aurait lieu le soir même aux jésuites de Saint-Paul.

Nicolas Poulain avait hâte de savoir ce que la Ligue préparait. En son absence, Marguerite avait reçu trois lettres d’Ameline que son fils avait portées chez Le Clerc.

Comme la soirée approchait, il décida de ne pas se rendre chez Richelieu avant le lendemain. Il pourrait ainsi non seulement lui raconter son voyage à Arras, mais aussi lui donner des nouvelles fraîches des Seize. En attendant, il revint rue Saint-Martin et passa saluer Olivier Hauteville.

Olivier était dans sa chambre avec Jacques Le Bègue, devant une montagne de papiers, avec des piles de jetons de cuivre, des plumes et des encriers en corne de différentes couleurs. Il reçut avec joie la visite de son voisin qui lui demanda s’il avait découvert quelque chose.

— Absolument rien ! C’est décourageant ! Il faudrait pouvoir comparer chaque livre, chaque bordereau, chaque rôle. Je passe mon temps à faire des additions avec un abaque et des jetons, puis à contrôler mes erreurs de calculs. J’ai l’impression de compter les grains de sable dans la mer. Si seulement je savais où chercher !

— M. d’O ne peut t’aider ?

— Il est parti ! Il a dû rentrer à Caen pour des affaires urgentes. Je n’ai plus personne pour me conseiller, sinon mon bon Le Bègue. Mais, je dois cesser de me lamenter, car j’ai fait la connaissance d’une exquise demoiselle que je voudrais que tu rencontres. Elle se prénomme Cassandre et son père est procureur au présidial d’Angers. Elle est à Paris pour quelque temps afin de soigner sa tante, religieuse au couvent des Filles-de-Sainte-Élisabeth. Puisque tu es de retour, pourquoi ne viendrais-tu pas souper demain avec ton épouse ? Je l’inviterais aussi et vous feriez connaissance.

Poulain souriait en entendant son ami parler avec tant d’enthousiasme de la jeune femme. Il en était visiblement amoureux et le lieutenant du prévôt en était heureux pour lui, car cela lui permettrait d’oublier les malheurs qu’il avait connus. Quand il était à Arras, il s’était rendu compte qu’il considérait désormais Olivier comme le frère cadet qu’il n’avait pas eu.

— Pourquoi pas ? Mais je suppose que cette dame n’est pas seule ? demanda-t-il.

— Évidemment, c’est une dame de qualité. Elle est à Paris avec son cousin qui lui sert de chaperon. Ils logent au Fer à Cheval.

Nicolas Poulain accepta et, le soir même, Olivier se rendit à l’auberge pour inviter Cassandre.

La jeune fille était encore sous le coup de l’émotion après avoir constaté la ferveur catholique d’Olivier et son attachement au duc de Guise. Ce ne fut pourtant pas pour cette raison qu’elle refusa son invitation, mais parce qu’elle jugeait que ce qu’elle éprouvait pour lui était périlleux pour sa foi. Au demeurant, elle s’était rangée à l’idée de Caudebec : leur mission était impossible et il valait mieux rentrer à Montauban.

Pourtant, quand le jeune Hauteville lui dit qu’il voulait la présenter au lieutenant du prévôt qui l’avait tiré de prison, elle changea d’avis et accepta de venir souper chez lui. La présence de ce prévôt lui apparaissait comme une chance à ne pas laisser passer.

Peut-être pourrait-elle le convaincre de perquisitionner chez Salvancy et de lui confisquer les quittances ?

Sa mission était revenue au premier plan de son esprit.

Le soir, Nicolas Poulain quitta sa maison avec une lanterne et une bonne épée pour se rendre aux jésuites de Saint-Paul où se tenait le conseil de la ligue parisienne. Là-bas, il fit aux membres de la sainte union un récit de son voyage et ceux-ci parurent satisfaits quand il expliqua avoir ramené d’Arras de quoi équiper trois cents hommes.

Ces armes allaient être bien utiles, même si elles étaient encore en nombre insuffisant pour une insurrection, selon Charles Hotman. Distribuées aux dizainiers et aux cinquanteniers, ainsi qu’aux membres du conseil, elles permettraient d’encadrer la populace qui s’agitait beaucoup trop. En effet, avec le nombre de plus en plus important d’habitants qui avaient rejoint leur confrérie, il n’était plus possible de garder le secret sur les projets du conseil des Seize. Aussi, bien des rumeurs circulaient, principalement celles du pillage des maisons des politiques, c’est-à-dire des proches du roi. Le bas peuple, les gens mécaniques[51], et surtout les gueux et les vagabonds chassés des campagnes par la misère, tous étaient las d’attendre. Ils ne supportaient plus la longueur de l’entreprise et voulaient tout de suite leur picorée si bien que les ligueurs avaient du mal à les convaincre de garder patience. Bien armés, dizainiers et cinquanteniers seraient obéis.

C’est qu’ils n’étaient pas encore prêts pour l’ultime combat, comme le rappelait Hotman aux conjurés. S’ils se découvraient trop vite, le roi les ferait pendre et s’entendrait finalement avec les huguenots.

Tous les membres du conseil n’étaient pas de son avis. Plusieurs proposaient de se défaire dès maintenant du roi, déclarant que c’était une entreprise facile. Parmi eux, certains suggéraient d’arrêter son carrosse et de le tuer ; d’autres proposaient seulement de le tonsurer et l’enfermer dans un monastère.

De nouveau on reparla du projet de le surprendre dans la rue Saint-Antoine, quand il revenait du bois de Vincennes. Les mieux informés assuraient qu’il n’avait avec lui que deux hommes à cheval et quatre laquais. Un avocat des Seize proposa qu’on arrête son carrosse avec une corde et qu’on crie : Sire, ce sont des huguenots qui veulent vous prendre ! À ces mots, expliqua-t-il plein de certitude, le roi serait tellement effrayé qu’il sortirait de sa voiture et qu’il serait facile de s’en saisir.

L’histoire fit rire M. de Mayneville à gorge déployée. Il rappela que le monarque avait toujours avec lui ses quarante-cinq qui tailleraient en pièces ceux qui voudraient l’arrêter. Qu’une telle opération ne pouvait être menée à bien qu’avec un prince pour la conduire, et surtout avec de fortes troupes.

— Tout ce que vous y gagnerez, ajouta-t-il en s’adressant aux plus audacieux, serait d’être tirés par quatre chevaux, comme l’a été Poltrot de Méré en place de Grève !

Au souvenir de l’exécution de Méré, l’assistance resta muette. Tous y avaient assisté. Malgré les hurlements de l’assassin, le bourreau lui avait arraché la chair des cuisses et des bras avec ses tenailles. Ensuite, ses membres avaient été écartelés par quatre chevaux, mais les tendons de l’assassin du duc de Guise étaient trop solides et il avait fallu que le bourreau coupât les muscles avec un gros hachoir. Finalement, les chairs ayant craqué, le tronc démembré de Méré était tombé à terre alors qu’il hurlait comme un damné. Pour mettre fin aux effroyables cris, le bourreau avait dû lui couper la tête en s’y reprenant à plusieurs fois. L’horreur avait été telle que beaucoup dans le public avaient perdu connaissance ; une personne était même morte de terreur.

Mayneville, constatant que les boutefeux étaient refroidis, ajouta que le duc de Guise serait bientôt prêt et qu’il aurait d’importantes nouvelles à leur donner d’ici huit jours.

Les rapines du Duc de Guise
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